Mylène astre de lumière
Posté par francesca7 le 13 mars 2012
Si Reverdy occupe dans cet album la première place des auteurs cités, il est suivi de près par l’anglaise Emily Dickinson, dont les centaines de poèmes publiés à titre posthume accompagnent Mylène depuis le début des années 1990. Outre Boris Vian présent dans la chanson Rêver et Guillaume Apollinaire, qui prête quelques vers à California, on croise aussi, au détour d’un couplet des allusions épisodiques à Lamartine ou à Musset. Sur cette base, et influencée par sa récente lecture du Livre tibétain de la vie et de la mort et de l’ouvrage de la psychologue Marie de Hennezel consacré à l’accompagnement aux mourants La mort intime, Mylène compose ici douze textes. A la lumière éblouissante de la nouvelle image médiatique de la chanteuse, qui n’hésite pas à parler de renaissance lorsqu’on l’interroge sur ce changement, ces écrits prennent une coloration optimiste et lumineuse qui ne leur correspond peut-être pas tout à fait.
En effet, si l’on prend bien garde aux déclarations de Mylène Farmer, on est rapidement amené à noter que cette «lumière» n’est pas acquise. Elle est au contraire une pulsion, un point de fuite que la chanteuse essaie d’atteindre. Si le regard porté sur le monde est plus positif, il demeure teinté par la présence envahissante de la mort, et la volonté d’espoir se heurte de plein fouet à la réalité du monde, à son imperfection. «Exister entre enfer et paradis, ce n’est pas toujours aussi simple» fait-elle remarquer à un journaliste qui l’interroge sur ces forces nouvelles. Et il est vrai que les textes d’Anamorphosée sont extrêmement représentatifs de cette nouvelle dualité. Nombre d’entre-eux, si ce n’est tous, présentent en effet toujours un fragile équilibre entre la pulsion de vie et la réalité sordide du monde. C’est évident dans Rêver, où l’amour est cantonné à l’espace du rêve, mais c’est aussi le cas par exemple dans Vertige. Les couplets en effet présentent une vision de plus en plus désabusée de la condition humaine. Dans une atmosphère de pluie, c’est d’abord le corps à corps amoureux qui est évoqué, mais éclairé par l’optique du bouddhisme, la vie se voit réduite à «une goutte d’eau nécessaire au voyage». Le deuxième couplet en revanche évoque une situation plus dure, puisque la pluie se fait chaînes, et que «l’homme gronde». De cette situation naît une nouvelle évocation du «voyage». Or ce voyage conduit «plus loin, plus haut», il s’agit d’atteindre son «astre». Voyage d’élévation, voyage de l’esprit donc, comme en témoignait la pochette de l’album. Ce n’est qu’en élevant son esprit au dessus de la vie, en la tenant à distance que la chanteuse parvient à ressentir, depuis les cimes, ce «vertige de vivre» qui lui découvre toute la beauté du monde. On comprend bien ici que l’on n’est pas si éloigné que ce repos que Mylène trouvait dans «l’indifférence». Dans l’altitude, il y a en fin de compte la même distance, et dans le vertige, le même engourdissement des perceptions… La chanson Et tournoie… répond elle aussi à cette dualité. A des couplets profondément désespérés répond dans les refrains l’exhortation à un renouveau spirituel, et à ce même vertige qui permet de voir la vie sous un meilleur jour, car quoi de plus propice à le provoquer que ce tournoiement de lumière que la chanteuse préconise ?
analyse site http://www.innamoramento.net/mylene-farmer/analyses/24/Lalbum_Anamorphosee/
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